La gestion de l'énergie par l'approche "Lean"

Les 2 approches « lean » et « gestion énergétique » coincident-elles ou vont-elles dans des sens opposés ?

Nous avons discuté et débattu avec Thierry André, spécialiste du Lean chez LeanDev du lien entre ces 2 approches.

La production des utilités (vapeur, air comprimé, vide…)

Ces installations de production d’énergie ont généralement dimensionnées à leur origine pour fournir 100% des besoins en termes de puissance installée.

Chaque unité de production a en effet été dimensionnée de manière à garantir, avec une certaine marge de sécurité même, l’alimentation des consommateurs en ce qui concerne l’utilité considérée.

Par exemple, dans une salle de compresseurs de production d’air comprimé centralisée, les compresseurs ont été dimensionnés pour s’assurer que tous les consommateurs, s’ils consomment tous en même temps, soient bien alimentés en air comprimé à la pression désirée, 9 barg par exemple.

L’approche Lean…

L’approche Lean utilise la notion de taux de rendement synthétique :
c’est le temps de fonctionnement de l’unité de production à un taux de rendement optimal (typiquement entre 80 et 100% de charge) sur le temps total de fonctionnement de cette unité de production.

Selon l’approche Lean, si le taux de rendement synthétique est faible, c’est qu’il y a surdimensionnement, ce qui est incompatible avec une approche Lean qui tend à se limiter au « juste nécessaire ».

Thierry André

-Lean energy empowerment expert-

La seule quantité nécessaire, 

de la seule qualité nécessaire, 

à l’endroit où c’est nécessaire, 

et au seul moment nécessaire. 

Les fondements du Lean appliqués à l’utilité sont :
On envoie seulement la seule quantité nécessaire, de la seule qualité nécessaire, à l’endroit où c’est nécessaire, et au seul moment nécessaire. 
Une adéquation entre la capacité et les charges est nécessaire.

L’approche de réduction des consommations d’énergie…

Dans une approche de réduction des consommations d’énergie, on calculera le rendement énergétique de l’équipement de production.
Lorsque c’est un rendement mensuel ou annuel moyen qui est calculé, on se rendra également compte d’un surdimensionnement le cas échéant.
En effet, pour une chaudière vapeur ou un compresseur, travailler à 20% de charge engendre, proportionnellement, plus de pertes énergétiques qu’à charge élevée, ce qui dégrade donc le rendement. 

En cherchant à optimiser les rendements de production des énergies, l’approche de réduction des consommations d’énergie rencontre ici l’approche Lean.

Baisser la consommation spécifique VS baisser la consommation absolue

L’approche Lean vise à baisser les coûts pour améliorer la performance industrielle.

Mais améliorer l’efficacité énergétique ne sera pas suffisant pour réduire les factures énergétiques en absolu.
Au niveau énergétique, si l’on souhaite baisser les coûts en absolu, il sera donc nécessaire d’aller plus loin que travailler sur la seule efficacité énergétique par exemple :

  • Travailler sur des processus innovants ;
  • Travailler sur le talon de consommation d’énergie : arrêter des process lorsqu’ils ne sont pas utilisés, supprimer les fonctionnements à vide (et donc les pertes à vide), limiter les stockages ce qui limitera également les consommations d’énergie qui sont liées au stockage…

Si l’on souhaite atteindre des objectifs ambitieux de réduction des consommations d’énergie au niveau européen, travailler également à réduire les consommations absolues a du sens, plutôt que de se retreindre à réduire les consommations spécifiques.

Production centralisée VS production décentralisée d’énergie

Selon l’approche Lean, la production décentralisée à proximité des équipements consommateurs a plus de sens car tout le réseau de distribution est en effet considéré comme un « surplus », comme un « stockage » également qui peut lui-même être sujet à des problèmes (les fuites p.ex.).
Or plutôt qu’à régler les problèmes, le Lean vise à les éliminer.

Avoir une vision plus globale intégrant le process et l’énergie

Afin d’aller loin dans une démarche d’amélioration énergétique, afin de pouvoir atteindre des objectifs d’amélioration ambitieux, il est nécessaire de décloisonner la « partie process » et la partie « flux énergétiques ». Il est indispensable que la personne en charge de l’énergie, et le responsable maintenance puissent travailler de pair avec la production (et le planning de production).

Cela pourrait permettre de remettre en débat, en discussion certaines consommations énergétiques auxquelles personne n’a encore touché car un peu trop « dans le process » qui « fonctionne bien comme ça ».

Bien sûr, il s’agit ici d’envisager des changements qui nécessiteront certainement des études préalables, des tests… mais dans certains cas, cette vision plus globalisante pourra faire sauter des verrous technologiques et arriver ainsi à produire la même chose avec un nouvel équipement innovant ou en changeant le flux énergétique utilisé  etc…

Par exemple, choisir de travailler avec un process de type continu ou avec un process de type batch aura une influence sur la consommation d’énergie.

Un comparatif de ces 2 types de process est réalisé ici : 
https://energycrew.org/comparatif-entre-le-fonctionnement-continu-et-batch-et-leur-influence-sur-la-consommation-energetique/

L’approche Lean aide certainement à sortir du carré pour aller vers plus d’innovations.

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